L’Equity Research fait partie des métiers les plus prestigieux en investissement, gestion d’actifs et en finance.
C’est un métier qui, en plus, d’être particulièrement épanouissant intellectuellement parlant, demande de la curiosité, d’aller à la pêche aux infos et d’analyser des scénarii divers et variés.
Dans cet article, nous faisons le point sur ce qu’est l’Equity Research et tout ce que vous devez savoir sur ce métier : salaire, profil, tâches quotidiennes, etc… Pour information, l’auteur de cet article a eu l’occasion de faire de l’equity research il y a plusieurs années.
Qu’est-ce que l’Equity Research ?
L’Equity Research est un domaine des métiers d’investissement qui vise à analyser les caractéristiques quantitatives et qualitatives de différentes entreprises afin de trouver les meilleurs investissements en actions -ou equity en anglais.
Généralement, le métier d’Equity Research est exercé par ce que l’on appelle communément des « analystes sell-side », c’est-à-dire des analystes dont l’objectif n’est pas d’investir eux même, mais d’apporter un conseil à des gérants et investisseurs externes via leurs analyses, afin que le gérant en question puisse avoir une idée de ce que vaut telle ou telle action.
L’Equity Research est donc un métier profondément intellectuel qui vise à réunir un grand nombre d’informations, les traiter et les synthétiser pour apporter un conseil en investissement pertinent.
Le processus d’Equity Research peut donc être illustré comme suit :
Première étape de l’equity research : la documentation
La première étape de tout travail d’Equity Research consiste donc à rassembler le plus de données et informations possible sur la valeur à étudier et son environnement (marché, environnement politique, technologique, légal, etc…).
Les principales sources d’informations sont évidemment en premier lieux les publications de l’entreprise elle-même et notamment ses rapports trimestriels et annuels. Ces documents peuvent aller généralement de 40 pages (rapport trimestriel) à plus de 200 (rapport annuel). Ils sont une manne d’information immense, que ce soit sur la société elle-même comme sur son marché.
Sachez aussi que les analystes en equity research qui travaillent dans les grandes banques sont généralement invités à la présentation de ces résultats par les dirigeants de l’entreprises et parfois même à des visites de sites industriels, lancement de produits, etc…
La deuxième grande source d’informations est composée d’études de marchés diverses et variées. En France, le cabinet Xerfi publie par exemple des études de marchés sur tous les grands secteurs économiques. Ces études permettent aux analystes d’estimer tant l’évolution de la demande que l’évolution des coûts ou de l’environnement concurrentiel. Elles viennent donc compléter à la perfection les rapports de l’entreprise elle-même, d’autant plus qu’elles se veulent plus objectives et impartiales.
La troisième grande source d’informations est bien évidemment la presse. Attention, nous n’entendons ici évidemment pas uniquement la presse généraliste, mais aussi et surtout la presse spécialisée qui saura beaucoup mieux vous renseigner sur les tenants et aboutissants de chaque fait d’actualité qui concerne l’entreprise étudiée.
L’actualité est donc d’une part décryptée avec un œil d’expert mais en plus vous trouverez des informations très précises sur des évènements dont la presse généraliste ne parlera pas du tout. C’est d’autant plus vrai qu’en France notre presse généraliste à une fâcheuse tendance à être très, voire trop, focalisée sur l’actualité nationale et n’aborde que peu l’actualité étrangère et bien souvent qu’en surface. Or une entreprise peut évidemment être fortement impactée par ce qui se passe en dehors de nos frontières.
Par exemple, un analyste en equity research sur le secteur du pétrole et du gaz doit être parfaitement au fait de l’actualité des continents africain et sud-américain et on peut vous garantir que ce n’est malheureusement pas dans la presse généraliste que vous trouverez des articles très fouillés à ce sujet. Ainsi lorsque des groupes armés affiliés à l’état islamique ont pris le contrôle de larges portions du Mozambique, dont une zone importante pour l’entreprise Total, la presse généraliste n’en a parlé qu’après coup et de façon très réduite. La presse spécialisée aurait en revanche permis de prévoir ce scénario plus en amont.
En plus de la presse spécialisée, les grands médias financiers comme Bloomberg et Reuters sont évidemment une excellente source d’information.
Enfin, il n’est pas rare que les meilleurs analystes en equity research demandent directement l’avis d’experts. Imaginez-vous demain devoir rédiger une note sur une entreprise du secteur des biotechnologie ou de la médecine comme la société Carmat qui produit et commercialise le premier cœur artificiel de l’histoire. Dans ce cas, l’avis d’un médecin vous serait d’une grande aide pour juger de la pertinence de l’offre et donc des chances de succès.
Deuxième étape : les calculs de valorisation
Une fois les informations nécessaires obtenues et traitées, l’analyste doit procéder à un travail quantitatif et notamment de calcul de valorisation.
Il faut bien comprendre que le premier travail de traitement de l’information n’est pas du tout indépendant des calculs de valorisation. Bien au contraire, toutes les données rassemblées précédemment vont permettre de faire des hypothèses sur le chiffre d’affaires, l’évolution des coûts, etc… afin d’estimer par exemple un EBITDA et un résultat net sur les prochaines années.
Ces métriques permettront quant-à-elle de calculer une valorisation, notamment avec des multiples d’ « Enterprise Value / EBITDA » ou de « P/E » pour « Price-to-Earnings » ou des free cash flow to equity qui serviront pour des modèles DCF.
Les valorisations ainsi calculées doivent ensuite être comparées au cours de l’action de l’entreprise. Trois scénarii sont alors possibles :
- La valorisation calculée est supérieure au cours : l’entreprise est sous-valorisée et l’action est donc une bonne affaire puisque son prix actuel sur les marchés est inférieur à la valeur théorique calculée. L’analyste peut alors émettre un avis « BUY ».
- La valorisation calculée est égale au cours : le prix reflète bien la valeur de l’entreprise, généralement correspondant à un avis « HOLD ».
- La valorisation calculée est inférieure au cours : l’action s’échange trop cher par rapport à sa valeur intrinsèque, correspondant à un avis « SELL ».
Un analyste equity research reste concentré sur un secteur en particulier
Sachez en outre qu’un analyste en equity research travaille systématiquement sur un secteur en particulier. Vous ne trouverez pas d’analyste qui travaille le lundi sur le secteur de l’automobile, le mardi sur les entreprises de santé et le mercredi sur le secteur du luxe.
L’objectif d’un analyste étant d’être hyper compétent et connaisseur sur les valeurs qu’il analyse, un certain degré de spécialisation est forcément nécessaire.
A quoi ressemble un rapport d’equity research ?
Maintenant que nous avons vu en quoi consiste le métier d’equity research, que diriez-vous, pour vous en faire une idée encore plus précise, de voir à quoi ressemble une analyse.
Voyons tout d’abord ce que contient systématiquement un rapport d’equity research :
- Un encart dès le début du rapport qui rappelle la date de publication du rapport, le cours de l’action à ce moment, la valeur cible calculée par le rédacteur du rapport (aussi appelée “target value”) qui est à comparer au prix réel de l’action comme nous l’avons vu et généralement l’Enterprise Value et l’Equity Value de la société.
- Une première page qui résume les derniers résultats et actualités de l’entreprise analysés en plusieurs bullet points et qui se termine généralement par un tableau qui récapitule les grands agrégats et ratios financiers de l’entreprise.
- Les pages suivantes contiennent le gros de l’étude : une analyse détaillée de chaque fait et donnée, comment l’analyse l’interprète et quelles en seront les conséquences ultérieures.
- Un dernier paragraphe qui détaille les méthodologies de valorisation utilisées, les hypothèses retenues et évidemment les résultats avec le conseil de l’analyste, généralement exprimé par l’un des trois mots suivants : “BUY”, “HOLD” ou “SELL”.
- Enfin, en dernière partie, des tableaux contenant toutes les données financières de l’entreprise comme son compte de résultat, son bilan, son tableau de flux, ses ratios financiers, etc…
- L’analyse comporte toujours les noms des analystes qui l’ont publiée accompagnés bien souvent de leurs adresses emails.
Si vous souhaitez vous faire une bonne idée de ce à quoi ressemble une analyse d’equity research en voici une sur une entreprise totalement fictive rédigée par Mergers and Inquisitions : exemple d’analyse.
Où exercer le métier d’Equity Research ?
Le métier d’Equity Research s’exerce généralement au sein des entreprises de brokers ou des départements de brokerage des grandes banques d’affaires et d’investissements.
En effet, l’activité d’un broker consiste à apporter un service d’achat ou vente de produits financiers pour ses clients. Si un fonds d’investissement souhaite acheter ou vendre au meilleur prix une grande quantité d’une action sur les marchés, il peut faire appel à un broker qui s’occupera de trouver le vendeur ou l’acheteur puis de réaliser la transaction. Le broker se rémunère alors avec une commission sur la transaction.
Le fait d’avoir une activité d’equity research parallèlement au brokerage permet alors au broker de conseiller des valeurs à ses clients. Dans la pratique, si le client est convaincu par les conseils du broker et qu’il les trouve de qualité, il passera ses ordres d’achats/ventes avec ce broker et pas un autre, même si au fond rien ne l’y oblige.
Finalement, l’activité d’equity research est donc une sorte de « faire-valoir » haut de gamme à l’activité de brokerage.
Voici quelques grands noms de banques ou de brokers qui disposent d’une activité d’equity research :
- JP Morgan Chases and Co
- Bank of America Merrill Lynch
- Credit Suisse
- Barclays capital
- Citigroup
- Goldman Sachs
- Morgan Stanley
- UBS
… et plus particulièrement les acteurs français de la place parisienne :
- BNP et sa filiale Exane,
- CACIB
- Natixis
- Société Générale
- Oddo
- … et plus généralement toutes les grandes banques d’investissement.
Enfin, sachez que depuis quelques années la relation historique de bonne pratique que nous vous avons décrite entre investisseurs et brokers, les premiers passant leurs ordres auprès des seconds lorsqu’ils sont satisfaits notamment de leurs études d’equity research, tend à s’étioler.
Par conséquent, la tendance est maintenant, pour de nombreuses banques, à faire payer directement l’accès à leurs études d’equity research.
Concrètement, cela consiste à payer un abonnement mensuel ou annuel pour avoir accès à leur plateforme internet d’equity research sur laquelle vous pourrez trouver et télécharger leurs études, des analyses chiffrées, etc…
D’ailleurs, cette nouvelle pratique commerciale a permis à des cabinets de pur equity research, qui n’ont aucun service de brokerage, d’éclorent dans le paysage. Leur activité consiste donc uniquement à produire des analyses equity et les vendre à des professionnels de la finance et autres gérants de fonds en manque d’informations, généralement au moyen d’une plateforme internet. Voici quelques exemples de ce type d’acteurs :
- Gavekal, fondé par le français Charles Gave et spécialisé sur les marchés asiatiques
- Alpha Value : l’un des plus connu equity research pure player
- CFRA
- StockGround : plateform d’equity research spécialisée sur les analyses quantitatives
- Atom Finance
Quels sont les salaires en Equity Research ?
L’equity research est un secteur qui paye bien, et même très bien. Voici un aperçu des rémunérations que vous pouvez atteindre :
- La rémunération d’un Stagiaire sera comprise entre 1 500 € et 2000 € par mois généralement.
- Le salaire d’un analyste junior se composera d’une partie fixe comprise entre 40 k€ et 70 k€ par an et d’un bonus pouvant aller jusqu’à 25% du salaire fixe, soit un package global entre 50 k€ et 88 k€ par an maximum.
- La rémunération d’un analyste senior sera composée d’une partie fixe comprise entre 70 k€ et 120 k€ par an accompagnée d’un bonus pouvant aller en moyenne jusqu’à 50% du salaire fixe, soit un package global allant environ de 100 k€ à 180 k€.
Les analystes stars d’un secteur peuvent prétendre à des rémunérations plus élevées que celles que nous vous avons indiqué, parfois jusqu’à 500 k€ par an entre le salaire fixe et le bonus annuel.
Ces niveaux de salaire se situent ainsi juste en dessous d’autres métiers financiers comme le M&A ou le Private Equity. Cependant, certains analystes en equity research vous répondraient que cette rémunération légèrement plus faible est largement compensée par un rythme de travail beaucoup plus raisonnable qui vous permet donc logiquement d’avoir une qualité de vie bien meilleure.
En effet, le métier d’equity research, bien que très prenant, implique tout de même moins d’heures que le M&A, qui représente quant à lui sans aucun doute le point le plus extrême en termes de d’horaires quotidiennes.
Quel profil pour exercer en Equity Research ?
Avoir un bagage financier solide
Le premier critère qu’il faut évidemment remplir pour exercer dans le secteur de l’equity research est d’avoir un bagage financier suffisant.
Comme nous l’avons vu le métier d’equity research implique de devoir trouver, comprendre et synthétiser un grand nombre d’informations avec comme but final d’en déduire leurs implications sur les résultats financiers d’une entreprise.
Par conséquent, il est nécessaire de savoir précisément comment fonctionnent et s’articulent des états financiers : Chiffre d’affaires, EBITDA, D&A, EBIT, actif circulant, passif, dettes long et court termes ou BFR ne doivent plus avoir aucun secret pour vous.
Il est évidemment aussi nécessaire d’être capable de calculer des valorisations très précisément et rigoureusement. Cela nécessite donc de bien connaitre les grands principes de valorisation parmi lesquels DCF (donc calculs et retraitement de free cash flows) et multiples.
Pour toutes ces raisons, un diplôme financier est très appréciable : Master de grande école de commerce ou d’université.
Certains diplômes ou certifications complémentaires peuvent bien évidemment vous aider à améliorer votre profil afin de dépasser les concurrents dans les processus de recrutement : le CFA est la certification star dans le monde en analyse financière et des diplômes dits “Masters spécialisés” de grandes écoles peuvent aussi participer à valoriser votre profil.
Maîtrise parfaite d’Excel
Côté technique, en plus de l’excellente maîtrise des grands concepts financiers, vous devez avoir une parfaite connaissance d’Excel.
C’est simple, quel que soit le secteur financier que vous choisirez, Excel sera à coup sûr votre principal outil de travail. L’equity research ne fait évidemment pas exception étant donné la masse de données chiffrées à traiter et les modèles de valorisation que vous devrez construire.
D’ailleurs, si vous souhaitez apprendre à maîtriser Excel en finance, vous pouvez vous tourner vers notre guide complet “Le guide de L’Excel-lence en finance” qui vous donnera toutes les astuces et conseils dont vous avez besoin pour faire face à toutes les tâches qui pourront vous être confiées.
Avoir une connaissance technique de son secteur : un avantage indéniable
C’est là un point trop peu souvent abordé lorsqu’on parle de métiers financiers et c’est particulièrement le cas en equity research, mais avoir des connaissances techniques dans son secteur d’analyse est un immense avantage.
En effet, étant donné que le travail d’equity research implique de devoir comprendre et analyser les résultats passés, présents et futurs d’une entreprise, si vous avez les compétences nécessaires pour comprendre son cœur de métier cela vous aidera à mieux décrypter son actualité et ses communications.
Pour ces raisons, le fait d’avoir par exemple un double diplôme finance/ingénieur peut attirer des recruteurs qui apprécieront votre double compétence.
D’autant plus que cela démontre une certaine capacité de travail de votre part.
Le savoir-être et les qualités requises
Travailler en equity research nécessite évidemment certaines qualités personnelles en plus de votre diplôme et de vos connaissances techniques.
Ce sont d’ailleurs des qualités que l’on retrouve dans la plupart des métiers financiers :
- Rigueur : vous serez amené à manier de nombreuses informations et données chiffrées et vos conclusions et rapports porteront le logo de votre banque. Par conséquent, les coquilles et erreurs d’inattention ne sont pas permises. Vous devez faire preuve d’une rigueur extrême dans le traitement de vos données, dans vos calculs de valorisation et dans la rédaction de vos notes.
- Précision : cette qualité va évidemment de pair avec la rigueur. Lorsqu’on calcule des valorisations, on s’aperçoit vite par exemple que le moindre changement de taux d’actualisation peut énormément impacter le résultat final. Par conséquent, vous devez toujours être précis dans vos données et vos calculs pour avoir les résultats et les analyses les plus pertinents possibles.
- Curiosité : c’est là une qualité assez propre au métier d’equity research et qui n’est pas toujours aussi nécessaire dans d’autres domaines de la finance. La base du métier d’equity research, sa matière première, c’est l’information. Par conséquent, pour être meilleur analyste que vos concurrents, vous devez être capable d’identifier l’information supplémentaire que les autres n’ont pas repérée (dans la limite du légal évidemment, n’allez pas commettre un délit d’initié). Dans ce contexte, le fait d’être curieux est évidemment un avantage indéniable.
- Travailleur : c’est une banalité de le dire mais le métier d’equity research, comme tous les métiers financiers qui bénéficient d’un certain prestige, demande une forte implication dans votre travail en contrepartie d’une excellente rémunération et d’un intérêt intellectuel indéniable. Si vous cherchez “une planque” alors vous pouvez passer votre chemin.
Vous connaissez maintenant à peu près tout ce qu’il y a à savoir sur le métier d’equity research. N’hésitez pas à partager vos questions, anecdotes ou compléments d’informations en commentaires ci-dessous.