L’ALM en finance, pour « Asset Liability Management » est une activité cruciale dans de nombreuses grandes institutions financières, banques, assurances et mêmes corporates.
Pourtant, c’est aussi une activité méconnue, mal comprise et vers laquelle peu de candidats se tournent malgré son intérêt quotidien.
Dans cet article, nous faisons le point sur ce qu’est l’ALM en finance.
Qu’est-ce que l’ALM en finance ?
L’ALM en finance, acronyme d’Asset Liability Management, aussi appelé en français « Gestion Actif-Passif » est une activité financière qui s’est développée d’abord dans les institutions financières anglo-saxonnes à partir des années 1970. C’est une activité qui vise à équilibrer certains postes au passif du bilan avec d’autres postes spécifiques à l’actif du bilan.
L’ALM en finance est une activité particulièrement développée dans les banques et les assurances puisque ces entreprises ont une nécessité opérationnelle à gérer l’équilibre des différents postes du bilan pour plusieurs raisons : adaptation aux évolutions des taux d’intérêt, respects des règlementations, besoins de liquidités, etc…
D’ailleurs, plus qu’une simple activité parmi d’autres, l’ALM est au cœur des préoccupations et de l’attention des directions financières des banques puisqu’une mauvaise gestion de l’ALM peut avoir des répercutions dramatiques comme un manque de liquidité à un instant donné.
L’ALM est donc avant tout une discipline de gestion des risques puisqu’elle permet de maîtriser les risques d’un décalage trop net entre la duration du passif et celle de l’actif.
Pourquoi devoir gérer l’équilibre actif-passif ?
L’ALM en finance vise donc à gérer l’actif et le passif d’un bilan pour plusieurs raisons qui correspondent toutes à un risque dont la maîtrise est nécessaire.
Voici ces principaux risques que l’ALM en finance permet de gérer, donc ses raisons d’exister :
L’ALM en finance pour gérer le risque de liquidité
Le premier risque bilantiel que l’ALM permet de gérer est le risque de liquidité.
Ce risque est sûrement le principal qu’une banque ou une assurance veuille maîtriser.
Il s’agit du risque de ne pas disposer d’assez de trésorerie ou d’actifs assimilables à de la trésorerie, c’est-à-dire avec une liquidité quasi instantanée, pour pouvoir honorer ses engagements à court terme envers ses clients ou ses créanciers.
Par exemple, le risque de ne pas pouvoir honorer les retraits de leurs clients, le virement des emprunts qu’ils ont souscrits ou ses dettes auprès d’autres banques (oui, les grandes banques se prêtent toutes des sommes importantes tous les jours, c’est d’ailleurs le taux d’intérêt moyen entre toutes les banque qui sert de taux de référence connu sous le nom de LIBOR pour London Interbank Offered Rate).
Attention, le manque de liquidité ne veut pas dire que la banque n’a pas assez d’actifs pour honorer ses engagements, mais que les actifs qu’elle possède ne sont pas assez liquides pour les transformer en trésorerie à temps pour honorer ses engagements.
C’est en cela qu’il faut distinguer le risque de liquidité du risque de solvabilité, qui est quant à lui bel et bien le fait d’avoir des engagements plus élevés que d’actifs pour les honorer.
Le risque de liquidité est aussi fortement scruté par les assurances. En effet, le métier de ces dernières vise à récolter les cotisations régulières de leurs clients et à les dédommager le jour ou le risque qu’ils ont assuré (par exemple un accident de voiture) se produit.
Un assureur doit donc être certain que la liquidité de ses actifs est suffisante pour satisfaire une importante sortie de trésorerie, par exemple si un grand nombre d’accidents se produisent au même moment ou si un accident de grande ampleur se réalise (un crash d’avion ou un accident industriel par exemple).
Le premier but de l’ALM en finance est donc de gérer le risque de liquidité en faisant en sorte que la banque ou l’assurance dont il est question soit toujours capable d’honorer ses engagements même si cela implique de payer des sommes importantes en un cours laps de temps.
L’ALM en finance pour gérer le risque de taux
Le deuxième risque que l’ALM doit permettre de gérer est le risque de taux.
Le risque de taux est le risque que les taux de rendement auxquels se feront les investissements futurs, donc les actifs futurs, soit inférieur aux taux garantis aux clients ou créanciers, donc les passifs.
Imaginons une compagnie qui vend une assurance-vie à un client avec un taux d’intérêts garanti de 3%. L’assurance vie dure 20 ans. Lorsqu’elle vend cette assurance-vie, la compagnie investie le montant sur des actifs avec un rendement de 4% sur 10 ans. Elle fait donc une marge de 1%. En revanche, il existe un risque de taux sur les 10 ans suivants puisque rien ne garantit que la compagnie pourra réinvestir à un taux au moins équivalent à celui fourni à son client.
Pour éviter une telle situation, l’une des solutions est d’ajuster la duration des actifs et des passifs pour que les deux soient similaires et évitent ainsi un tel risque.
La duration en finance est un calcul de durée de chaque flux financier pondérée par le montant actualisé du flux. La duration est donc bien une mesure de moyenne de temps mais dans laquelle un flux à forte valeur pèse plus qu’un flux à faible valeur.
Ainsi, à chaque fois qu’un passif arrive à terme, l’actif qui est censé le compenser suit le même chemin pour s’éteindre à peu près en même temps. De cette manière, la banque ou la compagnie d’assurance qui gère ce passif et cet actif dans son bilan évite le risque de devoir renouveler l’actif à un taux plus faible si celui-ci s’éteint avant le passif.
La gestion de l’évolution du bilan
Pour l’instant, nous avons surtout vu les objectifs et intérêts d’une gestion ALM pour une banque ou une compagnie d’assurance.
Mais l’ALM peut aussi être une activité exercée par des entreprises dites “corporate”, c’est-à-dire hors banques et assurances, notamment des entreprises industrielles ou de service.
Le premier objectif de l’ALM en finance mené par un corporate peut ainsi être la gestion d’actifs et passifs de fonds de roulement et notamment entre stocks ou dettes fournisseurs et créances clients, afin d’éviter un décalage trop important entre tous ces postes du bilan qui pourrait créer un risque de liquidité important pour l’entreprise.
Il peut aussi exister des cas très spécifiques de gestion ALM dans certaines entreprises.
EDF (le producteur d’électricité national en France pour nos lecteurs de l’étranger) en est un excellent exemple.
En effet, la législation en France oblige les entreprises du secteur nucléaire à avoir une poche d’actifs suffisante pour financer le coût futur de démantèlement des centrales nucléaires et de gestion des déchets radioactifs.
Le bilan d’EDF comporte donc une ligne sous le nom “Actifs dédiés”, de plus de 35 milliards d’euros, dont c’est l’unique objectif.
Ces 35 milliards d’euros sont donc gérés avec une logique d’ALM puisqu’ils sont sensés couvrir une provision au passif du bilan d’EDF d’à peu près le même montant.
Ainsi EDF doit éviter absolument un décrochage entre l’actif et le passif qui sont censés se compenser (risque de taux notamment) et le risque de liquidité lorsque l’entreprise devra sortir les fonds nécessaires aux travaux de démantèlement.
Où trouver un département ALM ?
L’ALM en banque
Le gros des postes d’ALM en finance se trouve évidemment dans les banques. Il y a deux grandes causes à cela :
- Tout d’abord, parce que l’équilibre entre actif et passif est l’un des plus grands centres d’attention de la direction d’une banque, puisqu’un décrochage entre les deux pourrait avoir des conséquences désastreuses. Par conséquent, toutes les directions de grands groupes bancaires ont un regard particulier sur l’ALM en finance afin, d’une part de ne pas mettre leur banque à risque et d’autre part, que la gestion du bilan réponde bien à l’orientation stratégique que souhaite la direction.
- Afin de répondre aux obligations réglementaires qui se font de plus en plus strictes au fil des années et des crises financières. Ainsi, une banque doit avoir en continue un certain niveau de solvabilité et de liquidité qui dépendent de la composition de son passif.
L’ALM en assurance
Les autres grands employeurs d’ALM en finance sont les groupes d’assurance.
Comme nous l’avons vu précédemment, le principe même d’une assurance est la gestion ALM entre les paiements qui peuvent être dûs aux souscripteurs (lorsqu’ils ont un accident par exemple) et les fonds que ces derniers versent régulièrement à l’assureur via leurs primes d’assurance.
Par conséquent, les groupes d’assurances possèdent tous des départements ALM très importants. Si vous souhaitez travailler dans le secteur de l’ALM en finance alors les grands groupes d’assurances sont parmi les premiers vers lesquels vous devriez vous tourner pour trouver un job.
Les fonds de pension et l’ALM
Enfin, nous n’avons pas encore parlé de ce type d’acteurs car ils sont peu présents en France du fait de notre système de retraite public par répartition, mais les fonds de pension sont aussi d’importants recruteurs dans le secteur d’ALM.
En effet, à l’instar des assureurs, leur métier consiste à récupérer les cotisations de leurs clients tout au long de leur vie professionnelle puis de leur verser une retraite le moment venu.
Par conséquent, la gestion ALM fait partie intégrante de leurs activités quotidiennes puisqu’un fonds de pension doit faire en sorte :
- d’avoir une part d’actifs assez liquides pour payer la retraite de ses clients le jour où il devra le faire,
- d’avoir les fonds suffisants pour payer la totalité de la retraite de ses clients, et donc d’avoir évité les risques de taux pendant toute la durée de cotisation de ses clients.
Cette activité est très répandue dans le monde anglo-saxon puisque ce sont des pays où les retraites sont généralement gérées non pas sur un système de répartition comme en France mais de capitalisation. Or la gestion d’une retraite par capitalisation est l’archétype de la gestion ALM dans le temps.
Quel profile pour travailler en ALM ?
Les métiers d’ALM sont des métiers très mathématiques puisqu’ils nécessitent de travailler avec d’importantes bases de données et des notions statistiques qui sont le cœur des analyses d’ALM en finance aujourd’hui.
Par conséquent, un master en mathématiques financières est un graal pour accéder à ce type de poste.
Si vous avez fait une école de commerce, rien n’est perdu pour autant. Essayez de rapidement vous diriger vers cette activité dès vos stages, afin que vos expériences “de terrains” compensent un parcours académique peut-être moins orienté vers les mathématiques. Enfin, un master spé est aussi une excellente façon d’optimiser votre profil pour des candidatures en ALM.